Découvrir la culture western afro-américaine à Oklahoma City
La tradition culturelle qui façonne l’Ouest américain trouve ses racines dans l’expérience des personnes noires, indépendamment de la façon dont l’histoire officielle tente parfois de la présenter. En effet, l’héritage afro-américain occupe une place fondamentale dans les récits de la culture occidentale, souvent oubliée ou minimisée. La ville d’Oklahoma City, au cœur de cette culture, joue un rôle clé dans cette histoire méconnue mais essentielle. Souvent peu évoquée, cette ville a été un lieu central dans l’émergence et la transmission du patrimoine des cowboys noirs, surtout après la fin de l’esclavage et la migration vers l’ouest que ces anciens esclaves ont entrepris, en quête de terres, de liberté et d’opportunités professionnelles, après la guerre de Sécession. La région, autrefois désignée sous le nom de Territoire Indien, reflète cette histoire dans le fait qu’elle abrite aujourd’hui 39 tribus amérindiennes reconnues par le gouvernement fédéral, ce qui place l’État d’Oklahoma en troisième position pour le nombre d’Indiens d’Amérique, derrière l’Alaska et la Californie.


Une exploration de la culture afro-américaine dans l’Ouest à Oklahoma City
En quête d’opportunités dans le travail à la ferme et les activités liées au bétail, des hommes noirs comme Bill Pickett ont été à l’avant-garde pour établir la tradition des rodéos afro-américains, qui perdure encore aujourd’hui. Le Bill Pickett Invitational Rodeo, dédié à honorer cette figure emblématique, ainsi que ses exploits, continue d’être un symbole de la culture des cowboys noirs, célébrée et préservée telle qu’elle est connue à travers l’Amérique. Ce rassemblement, qui porte le nom de cette légende, a pour but de rappeler l’importance de l’histoire et des réalisations des cowboys noirs dans le façonnement de l’Ouest américain.
Des figures comme Myrtis Dightman ont œuvré dans l’ombre pour ouvrir la voie à d’autres. Reconnu comme un pionnier du cowboyisme et l’un des meilleurs spécialistes du rodéo de son époque, son héritage a été mis à l’honneur pour ses 90 ans lors d’un épisode du podcast This Week in the West, diffusé depuis le Musée National du Cowboy et du Patrimoine Occidental d’Oklahoma City, animé par Seth Spillman, responsable marketing de l’institution. Dightman, souvent assimilé à Jackie Robinson dans le monde du rodéo pour sa contribution exceptionnelle, réside actuellement à Houston et est honoré par sa présence au Temple de la renommée nationale du rodéo ainsi que par l’insigne du Ring of Honor, également conservé au musée.
Son parcours a commencé dans un ranch de 4000 acres où son père effectuait ses travaux, développant très tôt une passion pour le rodéo. Il a endossé l’un des métiers les plus périlleux dans l’arène — celui de clown de rodéo, une profession qui a évolué pour devenir ce que l’on connaît aujourd’hui comme le combat contre le taureau. À cette époque, cette profession était souvent perçue comme étant réservée aux personnes blanches, mais Dightman a su briser les barrières et ouvrir la voie à d’autres Noirs dans cette discipline.
Il partageait souvent une pensée essentielle : « Beaucoup de gens ont peur des bêtes, mais il ne faut pas avoir cette peur. Si tu as peur, tu as déjà perdu. » Il ajoutait aussi : « La plupart des citadins pensent qu’ils ne peuvent pas affronter les taureaux. Ils me disent souvent : « Je ne peux pas le faire. » Mais comment en sont-ils sûrs ? On ne peut le savoir qu’en essayant. »
Une transmission de l’héritage par la cuisine
Des chefs comme Andrew Black jouent un rôle clé dans la préservation et la valorisation de cette tradition occidentale à travers la gastronomie. Vainqueur du prestigieux prix James Beard en 2023, dans la catégorie du meilleur chef, Black a marqué le paysage culinaire d’Oklahoma City comme étant la première personne noire à recevoir cette distinction dans la ville. Son influence ne se limite pas à ses restaurants innovants, tels que Grey Sweater, Black Walnut, Gilded Acorn, ou encore le tout récent Perle Mesta, mais inspire également un changement de perceptions dans le monde de la restauration.
Lors d’une interview avec Pagesafrik.info, Black a confié : « Personne dans l’Oklahoma ne fait ce que je fais actuellement, et avec la reconnaissance qui l’accompagne, c’est assez incroyable. » Il a raconté une anecdote : « Quand j’étais à Grey Sweater — peut-être que peu d’entre vous ont eu l’occasion d’y aller —, un client est entré et a déclaré qu’on lui avait dit de venir là. Lorsqu’il a goûté la nourriture et qu’on lui a dit que c’était la propriété d’un homme noir, il n’en croyait pas ses oreilles. Il pensait que c’était un simple restaurant de dégustation, et que ce gars allait décrocher un James Beard. Et devinez quoi ? J’ai finalement remporté ce prix dans cette catégorie. Cela montre que beaucoup ont encore des stéréotypes, s’attendant à ce que nous ne fassions que de la restauration barbecue ou du poulet frit. Mais les plats qu’on sert dans des établissements comme Perle Mesta, où la qualité dépasse les attentes, commencent à faire bouger les choses. Cependant, ce n’est pas encore la norme comme dans les grandes villes, où ce genre de reconnaissance est plus courant. »
Pour ceux qui visitent Oklahoma City pour la première fois, Black souhaite que les voyageurs, notamment ceux qui lui ressemblent, comprennent qu’il est tout à fait envisageable de sortir des sentiers battus, notamment en matière de gastronomie. Il encourage à explorer des expériences culinaires différentes, à dépasser les idées préconçues et à s’aventurer vers des saveurs nouvelles.
« J’espère que les gens réaliseront qu’il y a ici, en Oklahoma, un homme qui réalise de grandes choses sur une scène importante, » conclut Black. « La nourriture ne se limite pas à ce qu’on attend — pas uniquement du barbecue ou du poulet frit. Elle peut aussi être sophistiquée, audacieuse et personnelle, et surtout raconter une histoire que chacun peut comprendre et ressentir. »





